POUR/LOUER : créativité et art site-specific qui transforment l'espace urbain

TO/LET au fil des ans ont participé à divers festivals indépendants, en Italie et en Europe, ainsi qu'à plusieurs expositions personnelles et collectives parmi les plus importantes La giovane Italia, Officina Italia 2 et Premio Michetti organisées par Renato Barilli. Elles abordent souvent l'espace architectural de manière physique et sensorielle, se sentant libres de s'étendre au-delà des contours et des limites.

Le critique d'art Renato Barilli en parlait ainsi : "On peut trouver des affinités avec tous les artistes qui, comme elles, ignorent les limites, les clôtures, les contours et se sentent libres de s'étendre comme une tache d'huile, de se répandre. On peut faire référence au grand sud-africain William Kentridge, surtout lorsqu'il a orné les murs du Tibre de ses mystérieuses icônes, suspendues dans un brillant jeu entre le positif et le négatif. Ou on peut invoquer Keith Haring, qui, tout comme Sonia et Elisa, ne connaît pas de limites à son travail, l'étire, l'allonge, veillant en même temps à ce que les différents éléments se connectent entre eux, se mettent, pour ainsi dire, en cordée, ce qui est aussi une caractéristique à laquelle nos deux artistes veillent toujours à garantir".

En 2011, elles ont fondé eLaSTiCo, une association culturelle et un collectif d'artistes travaillant entre art visuel et production musicale, et depuis 2013, elles sont parmi les fondatrices, les curatrices et les organisatrices de CHEAP Street Poster Art, un projet d'art public.

Apprenons à les connaître davantage à travers cette interview.

#1 réponse

Bonjour Elisa, bonjour Sonia, vous vous êtes rencontrées à l'académie où l'une, Elisa, étudiait la Scénographie et l'autre, Sonia, la Peinture, comment êtes-vous devenues un duo artistique?

Bonjour Maria Rosa, c'est un plaisir de te revoir et merci pour l'interview <3

Nous nous sommes rencontrées dans les couloirs de l'Académie des Beaux-Arts de Bologne, parmi des amis communs, pendant les jours chauds des occupations. Nous sommes ensuite devenues colocataires, un peu par hasard. En fréquentant la même année d'académie et en habitant dans la même maison, nous avons commencé à passer les mêmes examens complémentaires aux cours principaux que nous suivions, et c'est ainsi que nous avons commencé à travailler ensemble. C'était en 2005, période de thèse. La SALLE DE BAIN est devenue le protagoniste de la thèse de Sonia : une recherche à 360 degrés sur toutes ses formes, culturelles, sociales, anthropologiques.

Ce fut le premier grand projet sur lequel nous avons travaillé à quatre mains. Nous avons réalisé une série d'illustrations animant les différentes positions adoptées dans la salle de bain, pour ensuite les imprimer sur des t-shirts.

Par la suite, nous avons construit CLOSED, une sculpture : une salle de bain tridimensionnelle à l'échelle 1:1 faite de treillis métallique, enfermée dans un cube de toile blanche rétroéclairée, la transparence du treillis donnant l'impression que les objets à l'intérieur étaient comme une sorte de radiographie. Accessible et utilisable par le spectateur. C'est de cette période et de ce projet en particulier qu'est né le nom TO/LET, qui voulait jouer de manière ironique, créant de la confusion entre les mots TO/LET et TOILET, mais que nous voulions aussi interpréter comme : À LAISSER.

#2 réponse

Dans le passé, la salle de bain a été un lieu très présent dans vos travaux et vous y voyez, je cite vos propres mots, "une ouverture entre l'intime et le non-intime". C'est de là que vient TO/LET. Pourquoi cet espace a-t-il été au centre de votre attention et de certaines interventions réalisées, au point de vous inspirer pour votre nom d'art?

La salle de bain a été au cœur de notre recherche car c'est un lieu qui nous a toujours intéressés, représentant un environnement particulier où se mêlent la sphère privée et publique, l'intimité et le partage. Nous avons trouvé très fascinant ce passage entre deux dimensions opposées, un espace de transition et de connexion entre différents mondes que nous avons voulu explorer à travers nos travaux, pour souligner la complexité et la richesse de significations que cet environnement représente pour nous. Pendant la période à laquelle vous faites référence, nous avons expérimenté de nombreuses techniques d'impression, de la gravure à la sérigraphie, en passant par le collage et la graphie, réalisant des interventions d'affiches, de papier imprimé découpé et collé. Nous avons envahi des toilettes publiques, du nord au sud de l'Italie mais aussi à l'étranger, des toilettes de bars, des murs, des rues, légalement et illégalement. L'affiche était la trace que nous laissions, mais c'était une trace éphémère, qui à son tour te quittait avec le temps.

#3 réponse

Dans votre travail, il y a beaucoup de qualité et une grande polyvalence, vous utilisez différents médias et techniques : du paste up (papier et colle sur mur), de grandes peintures murales, des installations parcourables. Parfois, vous créez des scénarios composés d'objets répétés, des sculptures réalisées avec une multitude de matériaux allant de la céramique au tissu sérigraphié. Comment abordez-vous l'espace architectural et qu'est-ce qui détermine le type d'intervention artistique que vous choisissez ?

Dans notre travail, nous cherchons toujours à adapter les œuvres à l'environnement environnant, en tenant compte de l'espace architectural dans lequel nous nous trouvons. Chaque projet artistique que nous choisissons de réaliser est déterminé par une série de facteurs, tels que la forme et les dimensions de l'espace, la lumière naturelle présente, la fonctionnalité de la zone, les couleurs, le contexte historique et culturel dans lequel nous nous trouvons. La relation avec les personnes, les animaux ou la végétation qui vivent et occupent l'espace avant nous et avec nous est très importante.
Avant de commencer une intervention artistique, nous analysons ses caractéristiques, son vécu qui nous parle toujours, pour identifier les Points Chauds. En fonction de ce stimulus visuel et émotionnel, nous décidons comment intervenir, c'est-à-dire ce que nous voulons dire et ensuite quelles techniques ou médias utiliser.

#4 réponse

Votre travail est souvent débordant, ignorant les limites et les contours, et s'étend sur les murs et les surfaces variées. On pourrait parler de Street Art ou d'Art Public comme on l'appelait autrefois, mais je sais que vous n'aimez pas trop les définitions et parlez de vos œuvres comme étant spécifiques au site. Quels sont les thèmes récurrents, s'il y en a, de votre recherche artistique?

Nous sommes motivées à concevoir des œuvres qui interagissent de manière significative avec l'espace environnant et qui stimulent la réflexion et le dialogue avec ceux qui les observent. Parfois, nous remettons également en question les conventions et défions les normes établies, en utilisant un soupçon d'ironie, de légèreté et de jeu.

Nous avons commencé à l'intérieur d'une salle de bain, pour sortir et envahir la sphère publique, exprimant nos visions de corps en contact les uns avec les autres et avec la nature, unis dans leur coexistence et leur transformation ensemble, des corps en constante évolution, hybrides entre l'humain, l'animal et le végétal jusqu'à une fusion symbiotique entre les éléments.

Les trous noirs sont presque toujours présents dans nos dessins et peintures murales. Des extrémités traversables, des trous de sortie et en même temps d'entrée qui sont pour nous presque des formes archétypales, nous permettant de faire des sauts continus entre les deux et les trois dimensions.

Un autre thème récurrent est celui des fils entrelacés qui créent des liens continus entre les figures de nos dessins et les espaces que nous habitons et modulons avec des installations, souvent légères et délicates. Ou encore les flaques d'eau qui se transforment en gouttes de liquides colorés et boueux "dans un transfert de la dureté des matériaux" (citation de Renato Barilli).

#5 réponse

J'ai lu que vous aimez beaucoup les escargots en tant que figure, moi aussi beaucoup, car ils nous rappellent que la lenteur est un concept auquel se réapproprier, surtout aujourd'hui, mais aussi la détermination dans la progression. Le temps et la volonté sont-ils des sujets qui suscitent une réflexion par rapport à votre parcours artistique?

Oui, le concept de lenteur et de détermination est certainement très présent dans notre parcours artistique. Dès les premiers travaux, nous passions des journées entières à découper du papier en petits modules à coller ensuite sur les murs qui étaient envahis sans limites d'espace ou de frontières.
Ou des heures et des heures passées à tresser et coudre du filet, pour créer nos sculptures légères. Comme les escargots, nous essayons de progresser lentement et avec attention dans notre recherche artistique, en accordant de l'importance au temps nécessaire pour développer nos idées, même dans la partie manuelle du projet, en allant perfectionner en détail nos œuvres. La détermination est ce qui nous pousse à continuer à travailler, en laissant de la place à notre recherche artistique, en alternant le temps avec les autres projets collectifs auxquels nous participons. En fin de compte, le temps et la volonté sont des sujets fondamentaux qui nous aident à nourrir notre créativité et à grandir en tant qu'artistes.

#6 réponse

En 2019, vous avez reçu le prix BELLUNO/CORTINA en tant qu'artiste de l'année, un prix prestigieux qui a célébré au fil des ans des artistes significatifs de différentes générations tels que Ontani, Mimmo Rotella et le duo Botto et Bruno. Que représente pour vous cette reconnaissance décernée par le critique d'art Renato Barilli?

Recevoir ce prix a été un grand honneur et une énorme source de motivation pour nous. Être reconnues par un critique d'art de grande envergure comme Renato Barilli et être incluses dans une liste d'artistes aussi significatifs a été vraiment spécial.
La rencontre avec Renato Barilli et l'attention qu'il nous a portée a commencé bien avant, lorsque nous venions de terminer nos études et qu'il nous a recommandées pour le Prix DAMS de l'Université de Bologne.

Avant même le Prix Belluno/Cortina en 2018, nous avions reçu le Prix Alinovi-Daolio, une reconnaissance italienne décernée à des personnalités qui se sont distinguées dans le domaine de l'art contemporain en basant leur recherche sur l'interdisciplinarité et la contamination des langages expressifs. Pour nous, c'était de l'émotion pure! Nous n'avons pas d'autres mots que de répéter que nous sommes honorées et immensément reconnaissantes envers Renato Barilli, de nous avoir donné l'opportunité de montrer notre travail dans des expositions prestigieuses, mais surtout, d'avoir cru en nous et en notre travail.

#7 réponse

En 2008 à Bologne, vous avez fondé eLaSTiCo, un espace qui promeut l'art contemporain sous toutes ses formes, en mettant particulièrement l'accent sur la contamination entre les langages et les auto-productions de jeunes artistes. Comment ce projet a-t-il évolué au fil des ans et qu'est-ce qu'eLaSTiCO représente aujourd'hui pour la ville?

eLaSTiCo est un projet artistique qui a évolué à travers différentes localisations et formes. Initialement créé comme Art-shop et petite galerie d'art, il s'est déplacé dans divers lieux, promouvant des artistes émergents et des auto-productions musicales. Après une période de pause, il est renaît sous le nom d'ELASTICOFa/ART, une fabrique de co-housing artistique et d'ateliers créatifs avec des résidences artistiques, des laboratoires et son propre label discographique, Elastico Records. Actuellement, il est en phase de transformation dans le nouveau lieu de Via De’ Carracci 69, qui sera un refuge pour les arts sous toutes leurs formes.

#8 réponse

Nous arrivons presque à la fin de l'interview, à la rédaction nous sommes tous passionnés de musique, et c'est l'un des langages artistiques que nous privilégions, pouvez-vous nous dire trois pistes auxquelles vous êtes particulièrement attachées. Merci.

Emerge – Fischerspooner
Poison Lips – Vitalic
Musique Automatique – Stereo Total